En France Louis IX (Saint Louis), règne depuis 1226 sous la tutelle de sa mère Blanche de Castille, puis seul depuis sa majorité en 1236. En 1259 il a 45 ans.
Dans le sud du pays, son frère Alphonse de Poitiers, gendre et héritier du comte de Toulouse, tient entre autres le Toulousain et l’Agenais.
Il y affermit son autorité et obtient l’hommage du comte d’Armagnac, pourtant naturellement dépendant du duché de Gascogne tenu par le roi d’Angleterre.
C’est que par héritage un peu forcé, la Gascogne est devenue, au XI° siècle, partie intégrante du duché d’Aquitaine (qui va bientôt prendre le nom de Guyenne). Toujours par héritage, le duché de Guyenne-Gascogne va échoir au comte d’Anjou, par ailleurs roi d’Angleterre au XII° siècle.
Mais en fait, le roi-duc tient essentiellement le Poitou, La Rochelle, Bordeaux et Bayonne. Par les armes ou l’usage subtil du droit féodal, les rois de France vont obtenir que cet immense duché qui incluait presque toute la région de la Loire aux Pyrénées, se réduise au Bordelais, aux Landes occidentales et à la région de Bayonne.
Ce sera, pour le roi-duc la réalité de son duché qu’on appellera en France : Guyenne, et en Angleterre Gascogne, car on y parle le gascon, avec des liens plus ou moins lâches entre le suzerain et les seigneurs voisins (Périgord, Armagnac, Béarn).
Henri III, roi d’Angleterre, duc de Guyenne-Gascogne puisque petit fils d’Aliénor d’Aquitaine, tente d’organiser l’anarchie gasconne à son profit en envoyant à Bordeaux le comte de Leicester (1249-1253). Celui-ci reçoit l’hommage du comte d’Armagnac et du vicomte de Lomagne, mais terrorise la région, surtout entre Bordeaux et Bayonne et doit être rappelé à Londres. Le roi donne alors la région en apanage à son fils qui lui succédera en 1272 sous le nom d’Edouard I.
Le nouveau roi-duc tente de calmer le jeu, en particulier en traitant avec les « intervenants » extérieurs : Il épouse la fille du roi de Castille (1254) qui lui cède ses droits sur la Gascogne, et signe avec Saint Louis le traité de Paris (1259) qui paraît assurer la paix.
Le traité de Paris est une étape décisive : il légalise la situation existante : reconnaît au roi d’Angleterre la possession incontestée du duché d’Aquitaine comme il se présente alors : Bordeaux-Bayonne et la suzeraineté sur les seigneurs gascons. Il prévoit le retour au roi-duc de l’Agenais (dont dépend Condom) si la comtesse Jeanne de Toulouse, qui le détient, meurt sans enfants, ce qui surviendra en 1271. Mais il faudra attendre 1279 et un nouveau traité (Amiens) pour que l’Agenais-Condomois soit rendu. Enfin un nouveau traité en 1286 (Paris) complète les précédents en rendant au roi-duc, entre autres, les villes de La Romieu et de Sempuy, un peu à l’est de Lagardère. La frontière s’est stabilisée, et le comté d’Armagnac, vassal du roi-duc, touche les terres de son suzerain sur sa partie nord.
Le roi-duc peut alors réorganiser son duché. Ses représentants, très actifs, tentent de développer son pouvoir, en exigeant des hommages, en achetant ou faisant construire des forteresses : Torrebren et Sendets, en Agenais ; en introduisant des garnisons grâce aux paréages (tutelles partagées) à La Romieu, Mézin, Larressingle, Goalard.
Mais simultanément la région se hérisse de petits châteaux, symboles efficaces de la puissance, aussi minime soit-elle, et dans l’Agenais-Condomois, le roi duc n’aura finalement que 6 places fortifiées contre 130 aux mains de ses vassaux. Le comte d’Armagnac, lui aussi, confronté à ses propres vassaux voit s’élever de nombreux châteaux sur son comté, et tente de garder la main en retardant au maximum les dons de coutumes à sa noblesse (Justian 1286), en créant des bastides (Valence 1274), en faisant élever des châteaux (Lagardère 1270).
Ainsi, la deuxième moitié du XIII° siècle est, dans la région une période d’intense constructions castrales et de remodelage urbain (bastides) davantage liée à l’essor démographique et économique, et aux pouvoirs locaux, qu’à la « grande politique internationale ».
La construction du château de Lagardère, demandée par le comte d’Armagnac à l’abbé de Condom, s’inscrit dans ce contexte.
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