Francis Lagardère est né à Beaumarchés (Gers) le 5 mars 1922 de Jacques Lagardère, landais, médecin militaire et de Juliette Gabaret, d’une famille du village de Beaumarchès.
Francis Lagardère passe sa petite enfance à Beaumarchès. Il suit ensuite sa scolarité à Fès (Maroc), à Lyon (Rhône) et Eauze (Gers), selon les différentes affectations de son père dans l’armée. A l’école communale, comme au collège Saint Taurin à Eauze, il a laissé le souvenir d’un élève intenable et bagarreur ce qui lui valut plusieurs exclusions.
En 1935, (il a 13 ans) sa famille s’installe à Lourdes (Hautes-Pyrénées) où son père, s’établit comme médecin civil. Francis continue ses études au collège de Saint-Pé-de-Bigorre (Hautes-Pyrénées), au collège de Bétharram (Lestelle-Bétharram, Pyrénées-Atlantiques). Il s’épanouit dans le sport en arrivant au lycée de Pau (Pyrénées-Atlantiques). Il entre ensuite à l’école hôtelière de Tarbes (Hautes-Pyrénées)
C’est un sportif accompli. Il pratique le football, le rugby, l’athlétisme (il devint champion de France du 4 × 100 m), le ski et l’alpinisme.
La défaite française et l’armistice du 22 juin 1940 entraînent la suppression du service militaire obligatoire. Le 30 juillet 1940 sont créés les «chantiers de jeunesse» qui vont progressivement s’organiser. La loi (18 janvier 1941) établit, pour tous les jeunes Français, le Service National Obligatoire (SNO) de huit mois, remplaçant le service militaire. Il se réalise dans une structure d’accueil, les «Chantiers de la Jeunesse Française», qui organisent des travaux d’intérêt général à la manière du scoutisme.
«Jeunesse et Montagne» constitue la branche Air des «Chantiers de Jeunesse», mais accessible à tous les jeunes francais volontaires et aptes physiquement. .
En 1941 et 1942, les équipes corespondantes développèrent une intense activité : forestage en altitude, balisage d’itinéraires, construction de refuges et de chalets, vol à voile, aide aux populations locales, courses en montagne et sports alpins.
L’organisation s’étoffa et cinq groupements devaient être peu à peu constitués :
-trois groupements dans les Alpes ;
-deux groupements dans les Pyrénées : Vignemale à Argelès-Gazost puis à Lourdes, Comminges à Luchon.
En 1941, Francis Lagardère (il a 19 ans) doit partir aux Chantiers de jeunesse. Il préféra s’engager dans le mouvement « Jeunesse et Montagne ». Il y vécut un entraînement physique intensif.
Au printemps 1941, le premier centre de « Jeunesse et Montagne », le « Groupement Vignemale », est implanté à Cauterets, réparti en quatre lieux différents : une équipe au Marcadau (1860m), une équipe au Lisey (1600m), une autre au col de Riou (1800m), la dernière à l’ancien hôtel du Pont d’Espagne (1400m). En fin 1941, un autre groupement dit « Comminges » est formé en Haute-Garonne, à Luchon. En 1942 naissent les centres de Luz et Gavarnie. Puis un autre centre d’hiver est mis en place à La Mongie avec Dartigue et Paradis.
Le groupement Vignemale, créé en 1941, s’établit à l’Hôtel des Bains, à Lourdes. Un premier groupe de deux cent cinquante jeunes monta à Cauterets.
En 1942, l’équipe de Cauterets participe aux championnats de France de « Jeunesse et montagne » à l’Alpe d’Huez. François Boyrie remonte les quinze concurrents qui le précèdent et fait remporter le relais à l’équipe des Pyrénées.
Mais les Chantiers deviennent peu à peu suspects aux yeux des Allemands qui les considèrent comme des lieux où peuvent se former des noyaux de résistance. Les centres « Jeunesse et Montagne » étaient des relais quasi officiels d’évasion vers l’Espagne et l’Afrique du nord : jusqu’en novembre 1942 la surveillance de la frontière était asssurée par les gendarmes et les douaniers français et le franchissement de la vallée de Cauterets vers l’Espagne s’effectuait sans difficulté en été.
Le 14 octobre 1941, un groupe de pyrénéistes de Tarbes : Maïté Chevalier, son mari, son frère Jean-Bernard, et un ami : Vincent Petty, font l’ascension de la « grande Fache » alors que viennent de tomber les premières neiges.
La Grande Fache est un sommet pyrénéen élevé (3005 m), à la frontière franco-espagnole, le point culminant de la vallée du Marcadau, au dessus de Cauterets. L’ascension commence au refuge Wallon, dans la vallée de Cauterets, atteint le col de la Fache (2664 m), et suit, à l’est la frontière sur une courte distance. La pierre y est réputée friable.
Lors de la descente sur la face nord, dans l’après midi, la jeune femme fait un faux pas et dévisse dans la pente enneigée. Son piolet se brise en biseau. Alors que son sort semble scellé, le morceau de piolet retenu à son poignet par une dragonne, se fiche dans la neige entre deux rochers enrayant sa chute. L’autre morceau sera retrouvé 900 mètres plus bas…La cordée crie au miracle. En remerciement, il est décidé qu’une statue de Notre Dame de Lourdes serait érigée au sommet.
Le 4 août 1942, trois grandes caravanes montèrent à la grande Fache, portant l’eau, le sable et le ciment. C’était un groupe de vingt personnes, dont Maïté Chevalier, et deux équipes de « Jeunesse et Montagne » qui venaient du centre de Cauterets.
Guidés par François Boyrie, les jeunes aménagèrent un endroit, au sommet, et élevèrent un monument de pierres : cairn ou montjoie surmontée d’une niche où ils placèrent une dalle qui servirait d’autel.
Ils avaient monté une statue de Notre-Dame de Lourdes sculptée à partir d’un bloc de marbre de Carrare par le sculpteur lourdais André Lacome, qui pesait plus de vingt cinq kilos
Francis Lagardère, vingt ans, de l’équipe de « Jeunesse et Montagne », avait réclamé le privilège de porter la Vierge de Lourdes jusqu’au sommet, il y avait droit, disait-il, puisqu’il était de Lourdes. Après installation de la statue, une messe fut célébrée, avec prières pour la France et ses prisonniers. Ainsi était accompli le vœu de l’année précédente.
Un an après, Francis Lagardère était fusillé comme membre de la résistance à Lyon.
Depuis lors, sauf en 1943 et 1944, le pèlerinage a eu lieu chaque année.
Le 19 août 1947, est inaugurée la « pointe Francis Lagardère » (2990 m) sur la crête, à quelques mètres à l’ouest du sommet de la grande Fache, dont il est « l’antécime ». C’est alors que trois Espagnols et un groupe de Français, emmenés par Vincent Petty et l’abbé Louis Pragnère, fondent l’association « Les Amis de la Fache ». Depuis lors, Français et Espagnols se retrouvent tous les quatre août pour continuer la tradition.
Le danger de monter en procession à la Grande Fache, se faisant de plus en plus criant, les organisateurs descendent d’un étage et construisent, en 1948, près du refuge du Marcadau (Wallon), une petite chapelle en bois inaugurée en 1950. Dix ans plus tard, elle sera remplacée par l’actuelle chapelle en granit, bénie en 1958 et dédiée à la mémoire de tous les disparus en montagne. On peut y voir les deux morceaux du piolet de Maïté Chevalier.
Les 4 et 5 août 2017 s’est déroulé le 75ème anniversaire du rassemblement pyrénéiste franco-espagnol de la Grande Fache (3006 m). Cette réunion montagnarde, fidèle à l’esprit des pionniers fondateurs, est auréolée désormais d’un record historique de longévité.
En 1942 l’Allemagne nazie imposa au gouvernement de Vichy, la réquisition et le transfert vers l’Allemagne de travailleurs français,pour compenser le manque de main-d’œuvre dû à l’envoi des soldats allemands sur le front de l’Est. Laval, le 16 février 1943, après avoir vainement négocié instaure le Service du travail obligatoire (STO).
Le recrutement, se fait désormais par classes d’âge entières. Les jeunes gens nés entre 1920 et 1922, c’est-à-dire ceux des classes « 1940 », « 1941 » et « 1942 » ont l’obligation de partir travailler en Allemagne (ou en France). La jeunesse, dans son ensemble, devient la cible du STO.
En novembre 1942, les Américains débarquent en Afrique du Nord, les Allemands envahissent la zone sud.
Début 1943, l’occupant ordonne l’évacuation des Pyrénées par les centres « Jeunesse et Montagne ». Les jeunes, qui se trouvent désignés par leur classe d’âge, doivent s’y soumettre et quitter les centres ou choisir de déserter et d’entrer en clandestinité. .
Réfractaire au Service du travail obligatoire (STO), Francis Lagardère entre dans la résistance. Il est trop connu dans la région pour y vivre en clandestinité et part pour les Alpes.
Jean Prévost, ancien normalien est un écrivain connu. Il est chargé de l’organisation du Vercors. En juin 1943 Prévost devient un lien charnière des différents groupes. Francis Lagardère rentre en contact avec Jean Prévost et travaille à la formation des cadres de l’Organisation de la Résistance de l’armée (ORA).
Il est affecté dans un premier temps au camp d’Albiez en Maurienne (Savoie) puis envoyé dans le Dévoluy (Drome-Isère-Hautes-Alpes) pour participer à l’établissement d’un nouveau camp à Tréminis (Isère).
La majorité des hommes du camp sont des réfractaires au STO et des étrangers déserteurs de l’armée allemande. Vers le 5 août 1943, Francis prend le train à Grenoble (Isère) avec Henri Cléret (Arlès) pour descendre à Saint-Maurice-en-Trièves (Isère) et rejoindre à pied Tréminis. Jean-Claude Rozan (Lanval) avait donné l’ordre à Cléret d’y fonder un maquis aux alentours de la baraque de la Bonce. Lagardère doit le seconder en tant qu’intendant.
Francis Lagardère s’occupe du ravitaillement du camp en nourriture, matériel, faux papiers. Il accueille également les nouvelles recrues et sert de canal de communication entre Rozan et Cléret. En tant qu’intendant, il réside au hameau de Château-Bas à Tréminis chez l’habitant.
En septembre 1943, Francis Lagardère est appelé à Grenoble pour prendre le commandement d’un corps franc.
Le 19 octobre 1943, les colonnes allemandes attaquent à l’aube. A Grenoble, sont arrêtés Francis Lagardère et André Girard-Clot par les autorités allemandes à l’hôtel du Mont-Blanc. Le bilan est lourd : un mort et seize arrestations. Les autres maquisards réussissent à s’enfuir. Conduit le soir même à la Gestapo de Grenoble il retrouve ses camarades du maquis. Il subit des interrogatoires. Il est le plus malmené de tous ses compagnons. Il garde très longtemps les menottes dans sa cellule.
Le 18 novembre, les Allemands le transfèrent, à Lyon et, le 21, il est emprisonné à Montluc.
Le 25 novembre, Francis Lagardère comparaît devant le tribunal militaire allemand de la Zone sud. Il est condamnéà mort le 26 novembre 1943 .
Le 23 décembre 1943, il écrit une dernière lettre à sa famille, où s’exprime sa foi catholique très vive.
Le 23 décembre 1943, les Allemands le fusillent sur le champ de tir de la Doua.
Il fut homologué lieutenant des Forces Françaises de l’Intérieur (FFI), fait chevalier de la Légion d’honneur et décoré de la Médaille de la Résistance à titre posthume.
Une avenue porte son nom à Lourdes.
En 1954 la Doua (à Villeurbane) est organisée en nécropole nationale. On y trouve la « butte des fusillés » : entre octobre 1943 et juillet 1944, 78 résistants furent fusillés à la Doua, provenant de la prison de Montluc..
Dans une cérémonie du 29 et du 30 septembre 1945, soixante corps sont rendus à leur famille (dont celui de Francis Lagardère), les dix sept autres sont inhumés sur l’autre versant de la butte des fusillés. Francis Lagardère est actuellement enterré à Beaumarchés auprès de ses parents.